Un même champignon, plusieurs visages : la dermatite fongique ne se laisse pas enfermer dans une seule case. Tantôt discrète, tantôt envahissante, elle frappe là où on ne l’attend pas et s’accroche même lorsque l’hygiène est irréprochable. Certains traitements classiques glissent sur elle sans l’atteindre, laissant les lésions s’étendre en silence.
L’automédication, loin de régler le problème, brouille souvent les pistes. Sous le masque d’une crème ou d’une pommade mal choisie, les symptômes s’effacent… pour mieux revenir. La peau change d’aspect, mais le champignon, lui, persiste. À ce jeu-là, seul un examen ciblé saura démasquer l’agent coupable et orienter, enfin, vers la bonne stratégie de traitement.
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La dermatite fongique, un trouble de la peau souvent méconnu
La dermatite fongique passe souvent sous les radars, y compris chez certains professionnels. Pourtant, ces infections de la peau causées par des champignons microscopiques représentent un motif fréquent en dermatologie. À la différence de l’eczéma, réaction inflammatoire liée à un terrain allergique ou atopique, la mycose cutanée découle d’une prolifération excessive de micro-organismes, attirés par les zones riches en kératine : peau, ongles, cuir chevelu.
On distingue trois grandes familles de champignons : les dermatophytes (sources de teigne, pied d’athlète, onychomycose), les levures comme candida albicans (responsable des candidoses cutanées), et les moisissures, qui touchent volontiers les ongles. Sans oublier Malassezia furfur, impliquée dans le pityriasis versicolor. Humidité, chaleur, vêtements serrés ou occlusifs : voilà le terrain de jeu favori de ces agents infectieux.
Selon la localisation, les manifestations varient. Voici les principaux signes à repérer :
- Peau : plaques rouges, squameuses, souvent arrondies.
- Ongles : épaississement, coloration jaune ou déformation (on parle alors d’onychomycose).
- Cuir chevelu : plaques sans cheveux, croûtes, parfois chute de cheveux (aspect typique de la teigne).
Là où l’eczéma et d’autres maladies de peau sèment le doute, la mycose cutanée possède un caractère contagieux : elle passe de peau en peau, parfois via un animal domestique. Un prélèvement mycologique, réalisé en cabinet, permet de cibler précisément le champignon et d’ajuster le traitement. Les chats et chiens, parfois porteurs sains, peuvent transmettre certains dermatophytes aux humains, notamment aux enfants.
Quels signes doivent alerter ? Reconnaître les symptômes d’une mycose cutanée
La dermatite fongique ne se manifeste pas partout de la même façon. L’aspect dépend du type de champignon et de la zone atteinte. Sur la peau glabre, on observe souvent des plaques rouges, arrondies, bien délimitées. Ces lésions pèlent en surface (desquamation) et démangent parfois violemment. Les dermatophytes provoquent des lésions en anneau, typiques de la teigne du corps ou de l’eczéma marginé de Hebra.
Le cuir chevelu n’est pas épargné : la teigne s’y traduit par des zones sans cheveux, des croûtes épaisses et une inflammation parfois impressionnante. Chez l’enfant, la confusion avec d’autres maladies du cuir chevelu est fréquente et le diagnostic doit être précis. Les ongles peuvent aussi être touchés : une onychomycose se repère à un épaississement, une teinte jaune ou une déformation progressive de l’ongle, qui devient friable et opaque.
Les muqueuses révèlent d’autres formes de mycose. La candidose orale (ou muguet) se voit à l’œil nu : plaques blanchâtres sur la langue, les joues, parfois accompagnées de rougeurs et de douleurs. Chez la femme, la candidose vaginale s’annonce par des démangeaisons, des rougeurs et des pertes blanchâtres.
Parmi les autres formes, le pityriasis versicolor se traduit par des taches claires ou brunes sur le torse ou le dos, peu inflammatoires mais persistantes. Quant au pied d’athlète (tinea pedis), il associe fissures entre les orteils, sensation de brûlure et macération. Chaque type de lésion mérite d’être examiné avec attention, surtout si elles résistent au traitement ou persistent dans le temps.
Pourquoi ces infections apparaissent-elles ? Comprendre les causes et les facteurs de risque
Les infections fongiques se développent lorsque les champignons microscopiques trouvent une faille dans nos défenses cutanées. Ces organismes, omniprésents dans notre environnement, attendent la moindre occasion pour coloniser la peau, les ongles ou le cuir chevelu. L’humidité, la chaleur et la macération leur ouvrent la voie. L’été, les lieux publics humides, piscines, douches collectives, vestiaires, deviennent des points chauds pour la contamination.
Certains profils sont plus exposés que d’autres. Voici les circonstances qui favorisent leur apparition :
- Défenses immunitaires affaiblies, en lien avec une maladie chronique, un diabète ou un traitement qui diminue l’immunité.
- Prise prolongée d’antibiotiques ou de corticoïdes.
- Situation particulière comme la grossesse ou la toute petite enfance.
- Transpiration abondante, notamment dans les plis, sous la poitrine ou entre les orteils.
- Port régulier de chaussures fermées, créant un environnement propice au développement des dermatophytes responsables du pied d’athlète.
La transmission se fait aussi bien par contact direct que par l’intermédiaire d’objets. On retrouve souvent :
- serviettes, tapis de bain, matériel de sport partagés
- animaux domestiques (chat, chien), parfois sources de contamination, notamment chez l’enfant
- hygiène insuffisante, exposition répétée à un environnement humide et chaud, ou peau fragilisée
Traitements efficaces et conseils pour bien prendre soin de sa peau
Pour poser le diagnostic, le médecin s’appuie sur l’examen de la peau, complété si besoin par un prélèvement à analyser en laboratoire. Ce geste permet d’identifier avec précision le type de champignon en cause, levure (candida albicans), dermatophyte ou moisissure, et d’ajuster le protocole de soin. Il ne faut jamais utiliser de corticoïdes sur une lésion suspecte : ce qui calme l’eczéma aggrave la mycose cutanée.
Le traitement de première intention repose sur des antifongiques locaux : crèmes, poudres, lotions, vernis pour les ongles ou shampoings adaptés au cuir chevelu. Les substances les plus prescrites restent le clotrimazole, le miconazole, l’econazole ou la terbinafine. Si la mycose s’étend ou résiste, un traitement oral par griséofulvine, itraconazole ou fluconazole peut être proposé avec un suivi médical.
Pour limiter les rechutes, voici les habitudes à instaurer au quotidien :
- Bien sécher les plis cutanés et entre les orteils après la douche
- Éviter de partager serviettes, chaussures, outils de manucure ou peignes
- Privilégier des chaussures respirantes et renouveler ses chaussettes chaque jour
- Désinfecter régulièrement les surfaces humides à la maison
Dans certains cas de candidose, une supplémentation en probiotiques (notamment les lactobacilles) pourrait limiter les récidives, selon des études récentes. Les remèdes improvisés ou naturels, non validés, sont à écarter : ils risquent de masquer les symptômes sans éliminer le champignon, et retardent la prise en charge adaptée.
Face à la dermatite fongique, la vigilance paie. Un diagnostic précis, des gestes quotidiens adaptés et un traitement ciblé permettent de tourner la page des mycoses. À chacun de déjouer les pièges du champignon, avant qu’il ne s’invite durablement dans le quotidien.